Evolutions
Une ferme est comme toute entreprise, une organisation vivante.
L'innovation, la planification, l'adaptation et la remise en cause permanente de son sytème de production est nécessaire pour permettre son développement et sa survie économique.
Lors de mon installation en 2013, j'avais planifié un développement uniquement basé sur la production de grains (céréales, protéagineux, oléagineux). Dans ce domaine, le contexte économique était porteur, et intégrer un élevage sur l'exploitation ne semblait pas intéressant.
En 2015, le contexte économique devenant défavorable pour les productions céréalières et dans une perspective de prix à long terme morose, j'ai réflechi à réintégrer l'animal dans le cycle de production par l'acceuil d'une troupe de brebis solognote d'éco-pâturage.
En 2016, suite aux inondations et à la perte de la quasi totalité de ma production céréalière, l'atelier d'élevage s'est révélé un formidable outil de compensation des pertes en valorisant directement sur pied les cultures "noyées" (pailles et grains consommés dans les champs par les agneaux).
En effet, outre la sauvegarde de la race solognote, l'emploi d'une race rustique locale adaptée aux conditions climatiques et aux sols de Sologne me permet de valoriser un sol difficile à exploiter dans un cadre conventionnel et de trouver de nouveaux débouchés dans un contexte agricole de plus en plus incertain.
En 2017, j'ai ainsi pris le "risque mesuré" de ne pas emblaver de nouvelles culture commerciales mais d'accentuer la spécialisation de mon exploitation sur la production de semences destinées à l'implantation des couverts d'engraissement des agneaux et de mise en lutte des brebis.
Extrait de la demande de réouverture des anciens espaces pastoraux soumis en 2018
Figure 2 : Plan de situation du projet de réouverture des surfaces pastorales sur la commune de Nouan le Fuzelier.
2.Présentation du territoire
Le projet se situe sur la commune de Nouan-le-Fuzelier (41600) sur le canton de Lamotte-Beuvron (Loir et Cher). Il s’étend sur les zones identifiées par une coloration verte (parcours sylvo-pastoraux) et violette (landes Natura 2000).
La commune de Nouan-le-Fuzelier ne dispose ni d'un P.O.S, ni d'un P.L.U. Le territoire ne fait l’objet d’aucun régime conservatoire au titre de la loi Sérot-Monichon. Et un Plan Simple de Gestion a été agréé pour la période 2009-2021.
Les Orientations Régionales de la Forêt (O.R.F) de Région Centre ne prévoyant pas l’exploitation pastorale de la forêt, le pâturage régulier des animaux dans les bois de plus de 30 ans est assimilé à un défrichement illicite, délit passible de sanctions pénales et administratives.
Le propriétaire des surfaces est une société civile familiale. Ces surfaces forment un domaine privé indivisible dont le périmètre (en rouge sur le plan de situation Figure 2) est matérialisé par une clôture de 2 m de hauteur, ce qui permet :
- Le maintien et la surveillance du troupeau sur zone (prévention des accidents routiers) ;
- Le maintien sur zone des chiens de travail et de protection du troupeau ;
- L’exclusion totale des suidés et cervidés sauvages ainsi que des canidés (exclusion sanitaire et sécuritaire).
3.Description du projet
A. Objectifs
Les objectifs de la réouverture des anciennes surfaces pastorales sont :
- Le développement économique de l’exploitation ;
- La préservation du patrimoine génétique par l’augmentation du cheptel ;
- La restauration de 48,33 ha de landes sèches à Callune et Bruyère cendrée , (Ulici minoris – Ericetum cinereae (code Natura 2000 – 4030-7) ;
A.1. Développement économique
La réouverture des anciennes surfaces pastorales permettra d’augmenter les ressources fourragères et sera constituée de 48,33 ha de landes et de 28,69 ha de parcours sylvo-pastoraux .
Cette augmentation des ressources permettra :
- D’accroître progressivement le cheptel à 800 brebis de race solognote conduites ;
- De créer un emploi à plein temps dédié à la gestion du troupeau.
L’augmentation du cheptel est calculée comme suit :
- Landes : chargement de 5 brebis / ha / an soit + 240 animaux
- Parcours : chargement de 8 brebis / ha / an soit + 230 animaux
A.2. Préservation du patrimoine génétique
Mon exploitation est engagée dans la préservation de la race locale ovine « brebis solognote ». L’ensemble des brebis est engagé dans une mesure de conservation MAEC et chaque brebis sélectionnée fait l’objet d’une inscription au Flockbook Solognot.
Cette race locale s’est parfaitement adaptée au biotope de Sologne et permet la mise en valeur des surfaces peu productives (5 brebis / ha / an) que constituent les landes de Sologne.
A.3. Restauration des landes sèches à Callune et Bruyère cendrée
L’expertise Natura 2000 a permis d’identifier un ensemble de milieux en mauvais état de conservation correspondant à des landes sèches vieillies à Callune et Bruyère cendrée2, subsistant sous des peuplements forestiers.
Ces milieux sont les reliques d’une vaste et ancienne lande de 1955 issues d’activités pastorales extensives.
La restauration des landes sèches sur une surface équivalente à celle de 1955 représente une action Natura 2000, inédite tant en surface qu’en valorisation économique (création d’une synergie économie agricole / préservation de l’environnement).
Figure 3 : Photographie historique commentée de la vaste lande de 1955 (source Géoportail IGN).
B. Modes d’ouvertures et de gestions des anciennes surfaces pastorales
Deux modalités d’ouverture et de gestion sont proposées dans le cadre de ce projet :
- La première correspond aux opérations de restauration des milieux d’intérêt européen dans le cadre d’une action étendue Natura 2000 (48,33 ha) ;
- La seconde correspond aux parcours sylvo-pastoraux (28,69 ha).
B.1. Restauration et gestion pastorale des milieux d’intérêts européens (48,33ha)
Figure 4 : Localisation des Landes à Callune et Bruyère cendrée (en violet).
La restauration des landes sèches vieillies à Callune et Bruyère cendrée se fera dans le cadre d’un programme Natura 2000, et les opérations de défrichage se feront progressivement sur une période de 5 ans.
Figure 5 : Landes boisées en voie de fermeture.
B.1.1. Opérations de restauration
a) Déboisement
Les travaux consisteront à supprimer progressivement l’état boisé afin de restaurer les surfaces pastorales de 1955. Toutefois, les sujets forestiers remarquables ou présentant un intérêt écologique voire paysager seront préservés, notamment les gros bois de chênes et de châtaigniers. Les pourtours des parcelles seront conduits en haies ou en alignements d’arbres.
Cette opération sera menée de manière progressive, sur 5 ans, afin d’assurer l’équilibre entre les surfaces rouvertes et le nombre d’animaux disponibles pour leur entretien.
b) Entretien et préservation par gestion pastorale
L’entretien et la préservation de ces milieux d’intérêt européen se fera par une gestion pastorale dont les densités d’animaux, les dates de présence des animaux et la mises en défens des parcelles, feront l’objet d’une concertation avec le Conservatoire d’Espaces Naturels de la Région Centre, en lien avec l’animateur Natura 2000.
Les parcelles seront découpées en paddocks et clôturées afin d’assurer à la fois une gestion fine du pâturage et leur mise en défens le cas échéant.
En cas de colonisation d’une parcelle par des espèces invasives ou indésirables (phytolacca americana /ronces) suite à son ouverture, un débroussaillage mécanique pourra être réalisé. La densité d’animaux sera adaptée sur la parcelle afin de limiter l’expansion de ces espèces aux autres parcelles et de les éliminer.
B.1.2. Engagements environnementaux
Les parcelles pastorales feront l’objet d’un engagement de bonne gestion environnementale au titre Natura 2000 pour une durée de 18 ans.
B.1.3. Ouverture et communication au public
Ce projet représentant une action inédite en région Centre, une action de sensibilisation du public sera mise en place à proximité des parcelles concernées. Des visites seront organisées avec l’animateur Natura 2000 et la Chambre d’agriculture afin de sensibiliser au bénéfice d’une gestion pastorale de ces surfaces.
B.2. Parcours sylvo-pastoraux (28,69ha)
Figure 6 : Localisation des surfaces sylvo-pastorales (rayé vert).
Ces surfaces sont issues de l’ancienne lande de 1955, l’état de conservation de la lande y est très mauvais, les peuplements forestiers sont moyens et leur valorisation se fait principalement par la trituration et le bois-énergie.
Néanmoins, ils sont un atout pour l’activité pastorale car ils sont majoritairement composés d’essences fruitières et fourragères.
A l’instar de ce qui se pratique en agroforesterie , la préservation de ces arbres et leur gestion sylvo-pastorale permettra de :
Fournir une alimentation saisonnière au troupeau :
- Alimentation fruitière par la consommation des glands et des châtaignes ;
- Alimentation fourragère lors de l’émondage des haies et des alignements d’arbres ;
- Assurer une couverture arborée protectrice du sol et du troupeau ;
Compléter les revenus de l’exploitation par une valorisation à long terme des arbres menés en pleine lumière (bois de chauffage et bois d’œuvre selon les essences).
B.2.1. Gestion sylvo-pastorale
a) Éclaircie et défrichage des parcours sylvo-pastoraux
Figure 7 : Parcelles sylvo-pastorales après première éclaircie (avec reprise de lande à droite).
Les peuplements forestiers seront éclaircis et les sujets d’avenirs ou remarquables seront préservés dans la limite d’une couverture arborée maximale comprise entre 30 et 50% (avec un maximum de 200 arbres par hectares ). Les pourtours des parcelles seront conduits en haies ou en alignements d’arbres.
Des exceptions locales à titre environnemental et paysager pourront faire l’objet d’une gestion conservatoire.
Ces opérations seront menées de manière progressive, sur 5 ans, afin d’assurer l’équilibre entre les surfaces rouvertes et le nombre d’animaux disponibles pour leur exploitation.
b) Régénération de la couverture arborée des parcelles sylvo-pastorales
La couverture arborée des parcelles sylvo-pastorales sera préservée. Le renouvellement des sujets forestiers se fera préférentiellement par plantation. Une régénération naturelle par rejet puis sélection pourra être envisagée en fonctions des essences.
Une attention particulière sera portée sur le choix des essences de renouvellement afin de toujours prendre en compte l’objectif pastoral. A cet effet, les essences fourragère ou fruitières à faible teneur en tanins solubles seront privilégiées.
Les chênes séssile et pédonculés seront préférés au chêne rouge d’Amérique dont les glands sont toxiques pour les brebis.
L’objectif de production sera principalement le bois de chauffage. Toutefois, après expertise des stations, une production de bois d’œuvre pourra être envisagée.
Les mesures nécessaires seront prises pour protéger les essences les plus sujettes aux dégâts des animaux. En cas de dépérissement des sujets forestiers ou des plantations, ceux-ci seront remplacés afin de maintenir une couverture arborée minimale.
c) Pâturage des parcours sylvo-pastoraux
Figure 8 : Brebis de race solognote avec agneaux sur parcours sylvo-pastoraux.
Les parcours sylvo-pastoraux feront l’objet d’une exploitation normale au sens de la réglementation, tout en tenant compte de l’objectif sylvicole secondaire.
Les parcelles seront découpées en paddocks et clôturées afin d’assurer à la fois une gestion fine du pâturage et la mise en défens des plantations ou des rejets.
En cas de colonisation d’une parcelle par des espèces invasives ou indésirables (phytolacca americana/ronces) suite à son ouverture, un débroussaillage mécanique pourra être réalisé. La densité d’animaux sera adaptée sur la parcelle afin de limiter l’expansion de ces espèces aux autres parcelles et de les éliminer.
B.2.2. Engagements environnementaux
Les parcelles sylvo-pastorales feront l’objet d’un engagement de bonne gestion environnementale au titre Natura 2000, pour une durée de 18 ans.
Le maintien d’une couverture arborée lors de la réouverture assurera une transition écologiquement et économiquement durable d’une gestion sylvicole vers une gestion sylvo-pastorale.
5.Impacts économiques et environnementaux
Ce projet concerne un territoire familial, une zone écologique protégée (Sologne), et 85 ha d’ancienne surfaces pastorales aujourd’hui boisée.
La réouverture de ces anciennes surfaces pastorales aura un impact économique majeur, quantifiable (+ 470 brebis) et favorable pour mon l’exploitation. Elle permettra la création d’un emploi à plein temps et la pérennisation d’une activité agricole sur un territoire défavorisé.
Elle aura également un impact important sur la biodiversité en venant modifier durablement un milieu boisé et enfriché.
Cet impact écologique est recherché dans le cas de la restauration de 48,33 ha de landes Natura 2000. Il est plus difficile à apprécier pour les 28,69 ha de parcours sylvo-pastoraux.
Les parcours sylvo-pastoraux sont une pratique culturelle ancienne en Sologne, mais cette pratique a aujourd’hui disparu. Il n’existe pas de référence agricole locale permettant de déterminer les bénéfices écologiques d’une gestion sylvo-pastorale comparée à une gestion forestière.
Toutefois, la garantie que ces surfaces seront maintenues en prairies permanentes, qu’elles feront l’objet d’une exploitation normale, et qu’elles seront préservées dans le cadre d’une charte Natura 2000, permet de garantir que l’impact écologique sera positif et durable.
6.Conclusion
La réouverture des anciennes surfaces pastorales de 1955 est une formidable opportunité d’aménagement durable du territoire.
Elle permettra de :
- Concilier la préservation des espaces naturels et le développement économique ;
- Pérenniser l’activité agricole sur la commune de Nouan-le-Fuzelier ;
- Restaurer un milieu écologique d’intérêt européen et assurer sa gestion durable ;
- Développer une pratique pastorale disparue et capitaliser sur les bonnes pratiques ;
- Préserver une race menacée emblématique de Sologne en renforçant ses effectifs ;
- Créer un emploi agricole à plein temps dans une zone défavorisée.
La réouverture de ces surfaces pastorales est l’assurance de construire une activité agricole durable et rémunératrice, en plein cœur de la Sologne.
Le système fonctionnant au quart de sa capacité, seulement 4 paddocks d'agnelage sont utilisés. Les agnelles sont mises par paddocks d'une vingtaine de brebis en pâturage continu jusqu'a la fin des agnelages. Aucune intervention ni présence humaine n'est requise pendant cette période.
La prolificité constaté sur les agnelles est proche de 1,2 et le taux de mortalité des agneaux est d'environ 20%.
La préparation des paddocks suivant et la planification de leur exploitation est toujours en cours et 24 paddocks sur les 42 sont opérationnels. Plus de 36km de fil higtensil ont été posés manuellement sur 4 rangés depuis 2016 soit 9km de clotures posées à une seule personne... ce qui n'empèche pas certaines agnelles de defier régulièrement les cotûres.
Mouche sera et est déja une aide préciseuse pour la manipulation des brebis, nous devons encore nous former pour exploiter au mieux son potentiel mais ce chien apporte dejà plus de séreintié lors des déplacements.
Compte tenu de la conduite de la ferme en Agriculture de Conservation (AC), de la réduction de la SCOP (surface en céréales) au profit des prairies et des couverts végtaux à destination des brebis l'ensemble de la Ferme de Pommerieux est convertie en 6 mois en Agriculture Biologique (AB).
Cette conversion express tient au parcours des brebis, moins de 20% des surfaces paturées ont réçu un amendement non biologique au cours des 5 dernières années. Le reste des surfaces pâturées étant constituées de prairies permanentes, de landes et de bois pâturés elles n'ont donc pas fait l'objet d'amendements.
Les surfaces en "conversion" sont destinées à l'implantation de couverts d'engraissement des agneaux et de la lutte d'automne.
Grâce à la GEODE (organisme gérant la race Solognote), nous achetons 2 lots d'agnelles et un lot d'antenaises (agnelle de plus d'un an n'ayant jamais agnellé).
La constitiion de cette troupe d'une petite centaine de brebis et d'agnelles permet de debuter l'exploitation rationelle des parcelles avec un chargement instantané d'environ 317 animaux par hectare en divisant temporairement chaques parcelles en deux, le taux de chargement instantané est alors d'environ 40UGB/ha par période de 3 jours à l'optimum de production.
Cette évolution permet le débourrage des prairies et la mise en place des premiers paddocks de rotation.
Suite à la rencontre avec Shane Bailey du cabinet en gestion de pâturage PâtureSens, et la remise d'un rapport sur l'opportunité économique de renforcer l'attelier élevage.
Le nouvel objectif de la ferme passe à 370 brebis mères en race pure Solognote à l'horizon 2019 avec modification du sytème de production en 100% paturage tournant.
Le pâturage tournant consiste à replacer l'herbe au centre de la production et d'optimiser son exploitation par les animaux. Tout le système repose sur la pousse de l'herbe et l'évitement du surpâturage (temps de séjour trop long des brebis).
Le premières naissances permettent la consitution d'une petite troupe d'une douzaine d'agnelles (le partage des agneaux entre Tarvel et la Ferme repose sur la priorisation de la troupe d'éco-pâturage).
Le système est fonctionnel mais la période de présence des brebis n'est pas optimale avec le système de production :
- Exploitation trop tadive des couverts d'automne à l'arrivée des brebis
- Surproduction du système lors du départ des brebis au printemps pour la saison d'écopâturage
Note : Les clotures en 3 fils hightensil ne sont pas adaptées aux brebis solognotes, il faut un minimum de 4 fils et des brebis éduquées.
Mise en place des couverts Biomax et acceuil d'une troupe d'éco-pâturage. Cette première expérience permet de mettre à l'épreuve le système et d'analyser les besoins en terme de nouriture pour les brebis au cours de leur hivernage.