Extrait de la demande de réouverture des anciens espaces pastoraux soumis en 2018
Figure 2 : Plan de situation du projet de réouverture des surfaces pastorales sur la commune de Nouan le Fuzelier.
2.Présentation du territoire
Le projet se situe sur la commune de Nouan-le-Fuzelier (41600) sur le canton de Lamotte-Beuvron (Loir et Cher). Il s’étend sur les zones identifiées par une coloration verte (parcours sylvo-pastoraux) et violette (landes Natura 2000).
La commune de Nouan-le-Fuzelier ne dispose ni d'un P.O.S, ni d'un P.L.U. Le territoire ne fait l’objet d’aucun régime conservatoire au titre de la loi Sérot-Monichon. Et un Plan Simple de Gestion a été agréé pour la période 2009-2021.
Les Orientations Régionales de la Forêt (O.R.F) de Région Centre ne prévoyant pas l’exploitation pastorale de la forêt, le pâturage régulier des animaux dans les bois de plus de 30 ans est assimilé à un défrichement illicite, délit passible de sanctions pénales et administratives.
Le propriétaire des surfaces est une société civile familiale. Ces surfaces forment un domaine privé indivisible dont le périmètre (en rouge sur le plan de situation Figure 2) est matérialisé par une clôture de 2 m de hauteur, ce qui permet :
- Le maintien et la surveillance du troupeau sur zone (prévention des accidents routiers) ;
- Le maintien sur zone des chiens de travail et de protection du troupeau ;
- L’exclusion totale des suidés et cervidés sauvages ainsi que des canidés (exclusion sanitaire et sécuritaire).
3.Description du projet
A. Objectifs
Les objectifs de la réouverture des anciennes surfaces pastorales sont :
- Le développement économique de l’exploitation ;
- La préservation du patrimoine génétique par l’augmentation du cheptel ;
- La restauration de 48,33 ha de landes sèches à Callune et Bruyère cendrée , (Ulici minoris – Ericetum cinereae (code Natura 2000 – 4030-7) ;
A.1. Développement économique
La réouverture des anciennes surfaces pastorales permettra d’augmenter les ressources fourragères et sera constituée de 48,33 ha de landes et de 28,69 ha de parcours sylvo-pastoraux .
Cette augmentation des ressources permettra :
- D’accroître progressivement le cheptel à 800 brebis de race solognote conduites ;
- De créer un emploi à plein temps dédié à la gestion du troupeau.
L’augmentation du cheptel est calculée comme suit :
- Landes : chargement de 5 brebis / ha / an soit + 240 animaux
- Parcours : chargement de 8 brebis / ha / an soit + 230 animaux
A.2. Préservation du patrimoine génétique
Mon exploitation est engagée dans la préservation de la race locale ovine « brebis solognote ». L’ensemble des brebis est engagé dans une mesure de conservation MAEC et chaque brebis sélectionnée fait l’objet d’une inscription au Flockbook Solognot.
Cette race locale s’est parfaitement adaptée au biotope de Sologne et permet la mise en valeur des surfaces peu productives (5 brebis / ha / an) que constituent les landes de Sologne.
A.3. Restauration des landes sèches à Callune et Bruyère cendrée
L’expertise Natura 2000 a permis d’identifier un ensemble de milieux en mauvais état de conservation correspondant à des landes sèches vieillies à Callune et Bruyère cendrée2, subsistant sous des peuplements forestiers.
Ces milieux sont les reliques d’une vaste et ancienne lande de 1955 issues d’activités pastorales extensives.
La restauration des landes sèches sur une surface équivalente à celle de 1955 représente une action Natura 2000, inédite tant en surface qu’en valorisation économique (création d’une synergie économie agricole / préservation de l’environnement).
Figure 3 : Photographie historique commentée de la vaste lande de 1955 (source Géoportail IGN).
B. Modes d’ouvertures et de gestions des anciennes surfaces pastorales
Deux modalités d’ouverture et de gestion sont proposées dans le cadre de ce projet :
- La première correspond aux opérations de restauration des milieux d’intérêt européen dans le cadre d’une action étendue Natura 2000 (48,33 ha) ;
- La seconde correspond aux parcours sylvo-pastoraux (28,69 ha).
B.1. Restauration et gestion pastorale des milieux d’intérêts européens (48,33ha)
Figure 4 : Localisation des Landes à Callune et Bruyère cendrée (en violet).
La restauration des landes sèches vieillies à Callune et Bruyère cendrée se fera dans le cadre d’un programme Natura 2000, et les opérations de défrichage se feront progressivement sur une période de 5 ans.
Figure 5 : Landes boisées en voie de fermeture.
B.1.1. Opérations de restauration
a) Déboisement
Les travaux consisteront à supprimer progressivement l’état boisé afin de restaurer les surfaces pastorales de 1955. Toutefois, les sujets forestiers remarquables ou présentant un intérêt écologique voire paysager seront préservés, notamment les gros bois de chênes et de châtaigniers. Les pourtours des parcelles seront conduits en haies ou en alignements d’arbres.
Cette opération sera menée de manière progressive, sur 5 ans, afin d’assurer l’équilibre entre les surfaces rouvertes et le nombre d’animaux disponibles pour leur entretien.
b) Entretien et préservation par gestion pastorale
L’entretien et la préservation de ces milieux d’intérêt européen se fera par une gestion pastorale dont les densités d’animaux, les dates de présence des animaux et la mises en défens des parcelles, feront l’objet d’une concertation avec le Conservatoire d’Espaces Naturels de la Région Centre, en lien avec l’animateur Natura 2000.
Les parcelles seront découpées en paddocks et clôturées afin d’assurer à la fois une gestion fine du pâturage et leur mise en défens le cas échéant.
En cas de colonisation d’une parcelle par des espèces invasives ou indésirables (phytolacca americana /ronces) suite à son ouverture, un débroussaillage mécanique pourra être réalisé. La densité d’animaux sera adaptée sur la parcelle afin de limiter l’expansion de ces espèces aux autres parcelles et de les éliminer.
B.1.2. Engagements environnementaux
Les parcelles pastorales feront l’objet d’un engagement de bonne gestion environnementale au titre Natura 2000 pour une durée de 18 ans.
B.1.3. Ouverture et communication au public
Ce projet représentant une action inédite en région Centre, une action de sensibilisation du public sera mise en place à proximité des parcelles concernées. Des visites seront organisées avec l’animateur Natura 2000 et la Chambre d’agriculture afin de sensibiliser au bénéfice d’une gestion pastorale de ces surfaces.
B.2. Parcours sylvo-pastoraux (28,69ha)
Figure 6 : Localisation des surfaces sylvo-pastorales (rayé vert).
Ces surfaces sont issues de l’ancienne lande de 1955, l’état de conservation de la lande y est très mauvais, les peuplements forestiers sont moyens et leur valorisation se fait principalement par la trituration et le bois-énergie.
Néanmoins, ils sont un atout pour l’activité pastorale car ils sont majoritairement composés d’essences fruitières et fourragères.
A l’instar de ce qui se pratique en agroforesterie , la préservation de ces arbres et leur gestion sylvo-pastorale permettra de :
Fournir une alimentation saisonnière au troupeau :
- Alimentation fruitière par la consommation des glands et des châtaignes ;
- Alimentation fourragère lors de l’émondage des haies et des alignements d’arbres ;
- Assurer une couverture arborée protectrice du sol et du troupeau ;
Compléter les revenus de l’exploitation par une valorisation à long terme des arbres menés en pleine lumière (bois de chauffage et bois d’œuvre selon les essences).
B.2.1. Gestion sylvo-pastorale
a) Éclaircie et défrichage des parcours sylvo-pastoraux
Figure 7 : Parcelles sylvo-pastorales après première éclaircie (avec reprise de lande à droite).
Les peuplements forestiers seront éclaircis et les sujets d’avenirs ou remarquables seront préservés dans la limite d’une couverture arborée maximale comprise entre 30 et 50% (avec un maximum de 200 arbres par hectares ). Les pourtours des parcelles seront conduits en haies ou en alignements d’arbres.
Des exceptions locales à titre environnemental et paysager pourront faire l’objet d’une gestion conservatoire.
Ces opérations seront menées de manière progressive, sur 5 ans, afin d’assurer l’équilibre entre les surfaces rouvertes et le nombre d’animaux disponibles pour leur exploitation.
b) Régénération de la couverture arborée des parcelles sylvo-pastorales
La couverture arborée des parcelles sylvo-pastorales sera préservée. Le renouvellement des sujets forestiers se fera préférentiellement par plantation. Une régénération naturelle par rejet puis sélection pourra être envisagée en fonctions des essences.
Une attention particulière sera portée sur le choix des essences de renouvellement afin de toujours prendre en compte l’objectif pastoral. A cet effet, les essences fourragère ou fruitières à faible teneur en tanins solubles seront privilégiées.
Les chênes séssile et pédonculés seront préférés au chêne rouge d’Amérique dont les glands sont toxiques pour les brebis.
L’objectif de production sera principalement le bois de chauffage. Toutefois, après expertise des stations, une production de bois d’œuvre pourra être envisagée.
Les mesures nécessaires seront prises pour protéger les essences les plus sujettes aux dégâts des animaux. En cas de dépérissement des sujets forestiers ou des plantations, ceux-ci seront remplacés afin de maintenir une couverture arborée minimale.
c) Pâturage des parcours sylvo-pastoraux
Figure 8 : Brebis de race solognote avec agneaux sur parcours sylvo-pastoraux.
Les parcours sylvo-pastoraux feront l’objet d’une exploitation normale au sens de la réglementation, tout en tenant compte de l’objectif sylvicole secondaire.
Les parcelles seront découpées en paddocks et clôturées afin d’assurer à la fois une gestion fine du pâturage et la mise en défens des plantations ou des rejets.
En cas de colonisation d’une parcelle par des espèces invasives ou indésirables (phytolacca americana/ronces) suite à son ouverture, un débroussaillage mécanique pourra être réalisé. La densité d’animaux sera adaptée sur la parcelle afin de limiter l’expansion de ces espèces aux autres parcelles et de les éliminer.
B.2.2. Engagements environnementaux
Les parcelles sylvo-pastorales feront l’objet d’un engagement de bonne gestion environnementale au titre Natura 2000, pour une durée de 18 ans.
Le maintien d’une couverture arborée lors de la réouverture assurera une transition écologiquement et économiquement durable d’une gestion sylvicole vers une gestion sylvo-pastorale.
5.Impacts économiques et environnementaux
Ce projet concerne un territoire familial, une zone écologique protégée (Sologne), et 85 ha d’ancienne surfaces pastorales aujourd’hui boisée.
La réouverture de ces anciennes surfaces pastorales aura un impact économique majeur, quantifiable (+ 470 brebis) et favorable pour mon l’exploitation. Elle permettra la création d’un emploi à plein temps et la pérennisation d’une activité agricole sur un territoire défavorisé.
Elle aura également un impact important sur la biodiversité en venant modifier durablement un milieu boisé et enfriché.
Cet impact écologique est recherché dans le cas de la restauration de 48,33 ha de landes Natura 2000. Il est plus difficile à apprécier pour les 28,69 ha de parcours sylvo-pastoraux.
Les parcours sylvo-pastoraux sont une pratique culturelle ancienne en Sologne, mais cette pratique a aujourd’hui disparu. Il n’existe pas de référence agricole locale permettant de déterminer les bénéfices écologiques d’une gestion sylvo-pastorale comparée à une gestion forestière.
Toutefois, la garantie que ces surfaces seront maintenues en prairies permanentes, qu’elles feront l’objet d’une exploitation normale, et qu’elles seront préservées dans le cadre d’une charte Natura 2000, permet de garantir que l’impact écologique sera positif et durable.
6.Conclusion
La réouverture des anciennes surfaces pastorales de 1955 est une formidable opportunité d’aménagement durable du territoire.
Elle permettra de :
- Concilier la préservation des espaces naturels et le développement économique ;
- Pérenniser l’activité agricole sur la commune de Nouan-le-Fuzelier ;
- Restaurer un milieu écologique d’intérêt européen et assurer sa gestion durable ;
- Développer une pratique pastorale disparue et capitaliser sur les bonnes pratiques ;
- Préserver une race menacée emblématique de Sologne en renforçant ses effectifs ;
- Créer un emploi agricole à plein temps dans une zone défavorisée.
La réouverture de ces surfaces pastorales est l’assurance de construire une activité agricole durable et rémunératrice, en plein cœur de la Sologne.